« Des nappes de brume
A l’orée musquée du bois
Des ombres se glissent »
TYPE
ÉQUIPEMENT SPORTIF
CLIENT
BORDEAUX MÉTROPLE
EQUIPE
K ARCHITECTURES mandataire, Alexandre Rolland architecte études et chantier
Bosco, architecte partenaire esquisse
Cetab, études techniques
OSMOSE, ingénierie sportive
ITAC, études acoustiques
AIA MANAGEMENT, organisation pilotage chantier
UNIT, signalétique
SURFACE
5 102 m2
BUDGET
12,2M€
PROGRAMME
CONSTRUCTION D’UN COMPLEXE SPORTIF ET ADMINISTRATIF INCLUANT HALLE D’ATHLETISME, SALLE DE MUSCULATION, DOJO, ES- PACE RESTAURATION, PÔLE ADMINISTRATIF.
RÉNOVATION DU STADE PIERRE-PAUL BERNARD, RECONSTRUCTION DES PISTES, MISE AUX NORMES NIVEAU COMPÉTITION INTERNATIONALE DES INSTALLATIONS, RENOVATION DES TRIBUNES 1500 PLACES CONSTRUCTION D’UN PAVILLON DES JARDINIERS
MISE EN ŒUVRE
BOIS ossature et et revêtements muraux, BÉTON fondations et sous bassement, MÉTAL couverture
SITE
TALENCE (GIRONDE)
CALENDRIER 2016/2023
CREDITS
Photographies, GUILLAUME AMAT
CONTEXTE
Inauguré en 1976, le stade Pierre-Paul Bernard de Talence a été bâti au cœur du bois communal de Thouars. Cette situation lui offre un environnement exceptionnellement sauvage. Le site est principalement dédié à l’athlétisme et accueille des manifestations d’envergure nationale et internationale, notamment le Décastar, inscrit au challenge mondial IAAF (World Athletics) des épreuves combinées depuis 1998. Kevin Mayer y a établi le record du monde de décathlon en 2018. Depuis, ce lieu s’est imposé comme une étape incontournable pour les athlètes mondiaux mais également comme le plus grand rendez-vous sportif annuel de la métropole Bordelaise accueillant plus de 15 000 spectateurs.
En mars 2020, le Décastar a reçu au stade Pierre-Paul Bernard la plaque Héritage de la part de World Athletics. Cette récompense vient célébrer la contribution unique de ce meeting international à l’histoire et au développement de l’athlétisme dans le monde.
En 2016, la communauté de communes « Bordeaux Métropole » désigne K ARCHITECTURES pour rénover la piste et les tribunes de ce stade ainsi que pour bâtir un pôle maintenance et, surtout, un nouveau complexe sportif abritant des halles de pratique indoor, un dojo, une salle de musculation, un pôle administratif et des espaces de convivialité.
ENJEUX
Le bois communal de Thouars est un monument naturel dans la ville. Y bâtir 4 000 m2 supplémentaires sans abattre d’arbre relevait de la magie. Ici se jouait l’éternel et infiniment actuel dilemme, « peut-on sacrifier une cathédrale vivante pour faire place à une chapelle artificielle » ? Et, quand bien même des clairières engazonnées avaient déjà été gagnées de longue date sur les biotopes naturels, quelles formes ce programme pouvait prendre dans le paysage alors qu’il appelait des bâtiments de la taille de hangars ?
CONCEPT
Pour Karine Herman et Jérôme Sigwalt, le bois de Thouars est un mythe vivant. C’est la représentation d’une utopie, celle d’un idéal agreste où les hommes auraient recouvré la capacité de vivre en symbiose avec le reste du vivant.
Le projet imagine un récit forestier où l’architecture s’écrit, de manière mimétique et minimale, en se glissant entre les arbres. Les vastes halles du programme ont été imaginées comme un hameau de granges rudimentaires. Les volumes ont été fragmentés et scindés de redents, dans leur plan comme dans leur profil, pour réduire le ressenti de leur masse. Leurs façades sont constituées de tasseaux de bois assombris, comme plongés dans l’ombre de la canopée. Les toitures sont réduites à une fine et modeste tôle métallique ondulée, évoquant des nappes de brumes. Les auteurs s’amusent à résumer leur conception par ce synopsis,
« Nous avons imaginé des nappes de brume à l’orée des bois
Puis, accessoirement, un bâtiment dessous
Qui était comme leur ombre »
Ou, au choix, par cet haïku,
« Des nappes de brume A l’orée musquée du bois Des ombres se glissent »
La simplicité et la minimisation des éléments superflus de ces constructions soulignent un mode de vie épuré, mettant en avant l’essentiel. C’est un projet qui parle de sérénité, face à la nature bien-sûr – avec laquelle il cherche à se réconcilier – et face aux athlètes aussi, pour leur offrir de l’apaisement.
Cette architecture prolonge également une histoire locale, celle de la « Girolle », cette maison populaire conçue par « L’école Bordelaise » dans les années 60’. La légèreté de ses toitures, leurs larges débords, ses jeux des transparences, l’invitation de la lumière naturelle comme l’invitation du paysage en elle, la sincérité constructive assumée ainsi que l’utilisation du bois comme matériau architectural sont autant de qualités communes avec cette petite maison que l’on rencontre souvent dans les pinèdes sablonneuses de la région.
D’ailleurs, pour mieux contextualiser l’histoire, ce sont ces mêmes pinèdes qui ont vu pousser les pins maritimes utilisés pour fabriquer l’ossature en lamellé-collé des nouveaux bâtiments du stade.
Le bois est massivement mis en œuvre en structure et en revêtement pour deux raisons. La première est sa qualité de matériau bio-sourcé et sa capacité à emprisonner une quantité importante de CO2.
« Cet édifice emprisonne près de 1000 tonnes de CO2 »
La seconde, plus subjective, réside dans sa capacité culturelle à transmettre une image douce et naturelle liée aux valeurs défendues par le projet.
Mais cette subjectivité n’est pas totale, il est intéressant de savoir que les biologistes ont mesuré l’effet biophylique du bois et ont conclu à une hausse de 10% de bien-être dans les architectures dominées par sa présence.
Toutes les façades s’habillent de « l’ombre » d’un bardage en bois brûlé inspiré de la technique japonaise du Yakisugi[1], littéralement « cèdre brûlé ». C’est une pratique ancestrale ancrée dans le respect de l’homme et de la nature qui l’entoure. Elle s’obtient en brûlant profondément la surface du bois. Elle est à la fois pratique et symbolique. Le matériau, ainsi traité naturellement, devient plus résistant au feu, aux insectes et aux champignons.
Le pavillon des jardiniers
Ce petit hangar abrite (1*) les jardiniers et leur matériel à l’orée du bois. C’est un satellite des halles. Il en partage le langage architectural.
Le virage Sud
Le virage Sud abrite les locaux de stockage sur lesquels est installé chaque année le village de barnums blancs qui accueille les VIP du DECASTAR. Une palissade faite d’une claire-voie de tasseaux brûlés inclinés, protège une galerie desservant les stockages et forme un soubassement qui prolonge le thème architectural général caractérisant désormais le site.
La tribune
Cet ouvrage bâti dans les années 70’ a été rénové sans modifier son écriture. Seul son soubassement, ses piles et ses façades sur parvis ont été rhabillés d’une teinte sombre pour le rendre plus furtif et plus en dialogue avec les édifices neufs. Son ventre contenant les vestiaires a été intégralement restructuré à neuf dans un monochrome sable.